Pour bien saisir la nature précise de leur intervention, nous devons d’abord insister sur le fait qu’ils sont très étroitement associés à l’archétype incarné par Saturne. Or cette-planète évoque traditionnellement un pouvoir de contraction et de fixation. C’est d’ailleurs en ce sens que les hermétistes l’associent à un processus consistant à nous établir au sein de nos limites et à nous y maintenir fermement, assumant ainsi pleinement notre condition existentielle. Nous pouvons donc en déduire que les Trônes favoriseront le développement d’une capacité à assumer nos limites propres.
Pour mieux approcher ce chœur angélique, il est toutefois intéressant de considérer le nom hébreu employé par les kabbalistes pour le désigner. Il s’agit du mot Aralim; la forme plurielle de Aral (ALePh –ReISh –ALePh – LaMeD) dont nous pouvons tirer le terme hébreu la‘ (LaMeD–ALePh) signifiant.« non» ou « ne pas ». Nous aurons l’occasion d’analyser ce terme de manière plus exhaustive en étudiant le Trône en chef; LEOu (YaH). Toutefois nous pouvons déjà mettre en exergue le fait qu’il évoque l’interdit et conséquemment les limites à ne pas dépasser. Dès lors, en tant qu’Aral, les Trônes nous confrontent à nos limites existentielles que nous devons, dès lors, assumer pleinement.
Par ailleurs, il est intéressant de souligner qu’au niveau du nom hébreu Aral, le terme la‘ (LaMeD–ALePh), évoquant la négation (et conséquemment l’interdit les limites à ne pas dépasser), est-apposé à la lettre ReISh qui, issue d’un ancien idéogramme représentant une tête vue de profil, évoque l’origine en tant que principe identitaire, Ces limites se rapportent donc bien à l’expression de l’essence profonde qui nous anime. Loin d’être édictées par un Dieu cherchant à nous maintenir dans un état d’enfermement, elles nous offrent donc, au contraire, un cadre d’expression adéquat nous permettant de nous accomplir pleinement. Loin de nous entraver ou de nous aliéner, elles constituent en effet une structure nous guidant sur une voie de réalisation. Ajoutons que le mot la‘ (LaMeD–ALePh), lu en sens inverse, donne le terme EL (ALePh–LaMeD) à partir duquel nous pouvons former le nom Eloha ( ALePh – LaMeD–He) et sa forme plurielle Elohim ( ALePh – LaMeD–He–YoD–MeM). Or ces trois noms, El, Eloha et Elohim, désignent la présence immanente de Dieu au sein de Sa création. Ils évoquent donc Dieu qui nous vivifie et nous maintient dans les limites existentielles qu’Il nous a fixées. À ce titre d’ailleurs, en permutant les trois lettres qui constituent le nom Eloha ( ALePh – LaMeD–He), nous obtenons le verbe ahal ( ALePh – He – LaMeD) signifiant « faire habiter sous la tente ». Or l’image de la tente évoque bien un endroit clos au sein duquel l’être pourra s’exprimer et se développer. Ainsi, nous retrouvons à nouveau la fonction inhérente aux Trônes consistant à nous conduire à nous établir fermement, au sein de nos limites.
Dans cette perspective, il est intéressant de considérer à nouveau le terme Aral (ALePh –ReISh –ALePh – LaMeD). En effet, il est couronné des deux lettres ALePh et LaMeD formant le nom de Dieu dans son expression matricielle et créatrice. Quant aux lettres ReISh et ALePh, contenues à l’intérieur de cette matrice, la première (ReISh) correspond à l’esprit placé dans une attitude de réceptivité (BeIth et Kaph, les deux autres lettres de la même famille, correspondant respectivement au corps et à l’âme placés dans cette même disposition d’ouverture). ReISh est d’ailleurs issu d’un ancien idéogramme représentant une tête, évoquant symboliquement l’esprit. Or cette lettre est « tournée vers ALePh , le principe créateur. N’est-ce pas là une définition éloquente de la créature comme entité ouverte et tournée vers l’énergie créatrice de Dieu ? Que ces deux lettres soient couronnées par les lettres ALePh et LaMeD nous Confirme donc que les Aralim ont pour fonction de nous amener à assumer notre véritable nature et à reconnaître notre dépendance envers le Créateur en assumant pleinement notre condition et en occupant le sein de la matrice divine.