ANALYSE KABBALISTIQUE DE :

Le nom du Chérubin ALaD (YaH) est constitué d’un radical composé des lettres ALePh, LaMeD et DaLeTh à partir desquelles nous pouvons former le mot El (ALePh LaMeD), l’un des noms de Dieu, mais aussi le mot dal [DaLeThLaMeD) signifiant « indigent » ou « pauvre »

« Le riche ne donnera pas plus, le pauvre (dal) ne donnera pas moins que la moitié du sicle, pour acquitter l’impôt de l’Eternel, à l’effet de racheter vos personnes. »

– Exode XXX, 15

Quant à la particule YaH, elle place ce radical dans une perspective de relation à  Dieu. Nous allons donc approfondir la signification de ces mots afin de mieux saisir la signification profonde du nom formé à partir du radical correspondant.

À propos du nom divin El, nous avons déjà eu l’occasion de mentionner qu’il se réfère au nom Elohim évoquant la fonction créatrice de Dieu et son action immanente au sein du créé. En effet, Elohim est  l’aspect de Dieu qui vivifie la créature et la maintient dans .les limites existentielles qu’Il lui a fixées. À ce titre d’ailleurs, en permutant les trois lettres formant le nom Eloha (ALePh LaMeDHe), dont Elohim, est la forme plurielle, nous obtenons le verbe ahal (ALePhHeLaMeD)   signifiant « dresser des tentes».

«Il se transporta de là vers la montagne à l’est de Béthel et y dressa sa tente (ahal), ayant Béthel à l’occident et Aï à l’orient… »

– Genèse XII, 8.

Or l’image de la tente évoque bien un endroit clos au sein duquel l’être peut s’exprimer et se développer. Ainsi, Elohim (et conséquemment El) désigné l’aspect de Dieu qui établit chaque créature au sein de ses limites existentielles, lui prodiguant les ressources nécessaires pour s’y développer et s’y déployer.

Toutefois, au niveau du radical à l’origine du nom ALaD (YaH), El mobilise la lettre DaLeTh qui est l’homonyme du mot hébreu dalet (DaLeThLaMeDTaV) signifiant « Porte »

« II alla fermer la porte [dalet] sur eux deux, puis invoqua le Seigneur. »

– 2 Rois IV, 33.

Or la porte évoque, dans le symbolisme traditionnel juif, un passage entre deux états, entre deux Mondes. C’est d’ailleurs pourquoi ce symbolisme occupa toujours une place très importante dans les traditions initiatiques. À titre d’exemple, l’allée centrale des temples conduisant à l’endroit secret où se trouve le Saint des Saint à était toujours marquée par des portes somptueuses que seul le clergé pouvait franchir. Dans la même perspective, le Christ déclarera à ses disciples:

«Je suis la porte. Si quelqu’un entre par moi, il sera sauvé »

– Jean X, 9.

Et c’est sans doute pourquoi une représentation du Christ en gloire surmonte très souvent la porte centrale des cathédrales. Ainsi donc, DaLeTh représente bien souvent un processus de rénovation par lequel une réalité, sous l’action de la puissance divine, passe d’un état profane (source de stérilité et de mort) à un état sacré (source de fécondité et de vie).

Dès lors, nous pouvons en déduire que le Chérubin ALaD (YaH) nous invite à bien conscientiser notre condition de créature, une condition empreinte d’impuissance, de finitude et de vulnérabilité (ou encore de pauvreté et d’indigence pour faire écho au mot dal que nous avons également extrait du radical), nous invitant toutefois à ne plus percevoir cette pauvreté de manière profane, c’est-à-dire à travers les yeux d’un ego en  mal de pouvoir qui n’y voit qu’enfermement et aliénation, mais de manière sacrée, c’est-à-dire à travers les yeux du cœur, ceux de l’amour. Nous y percevrons dès lors un moyen par lequel Dieu se révèle à nous et nous fait connaître Ses plans.

Pensons ce titre aux propos du Christ lorsqu’au moment du Jugement dernier il s’adressera-à ceux placés à sa gauche:

«. Allez loin de moi, maudits dans le feu éternel qui a été préparé pour le diable et ses anges. Car j’ai eu faim et voue ne m’avez pas donné à manger, j’ai eu soif et vous ne m’avez pas donné à boire, j’étais un étranger et vous ne m’avez pas accueilli, nu et vous ne m’avez pas vêtu, malade et prisonnier et vous ne m’avez pas visité. » Alors ceux-ci lui demanderont à leur tour : « Seigneur, quand nous est-il arrivé de te voir affamé ou assoiffé, étranger ou nu, malade ou prisonnier, et de ne point te secourir ?  » Alors il leur répondra: « En vérité je vous le dis, dans la mesure où vous ne l’avez pas fait à l’un de ces plus petits, à moi non-plus vous ne l’avez pas fait.' »».

– Matthieu XXV, 41-45

Par ces paroles, le Christ nous enseigne en effet qu’à travers nos limitations, notre impuissance, notre finitude et notre vulnérabilité (notre- pauvreté et notre indigence, Dieu nous appelle à nous ouvrir à Son mystère (celui de l’amour) et à y participer pleinement. C’est tout l’enjeu du Chérubin ALaD (YaH).