ANALYSE KABBALISTIQUE DE :

      

Le nom du Séraphin KeHaTh  (EL) est constitué d’un radical composé des lettres KaPh, He et TaV à partir desquelles nous pouvons former le  mot hikét (HeKaPhTaV) désignant « la  fonte »  ou  « la  fusion. ». De même,  nous pouvons constituer le  terme Katat (KaPhTaVTaV) signifiant « broyer », « écraser » ou « piler » (ce terme donne. d’ailleurs naissance  au mot Ketitah (KaPhTaVYoDTaVHe) désignant le broyage ou l’écrasement).

« Quant à toi, tu ordonneras aux Israélites de te procurer de l’huile d’olives broyées (katat) pour le luminaire, afin qu’une lampe brille en permanence (dans la Tente du Rendez-vous) ».

– Exode XXVII. 20.

Quant à là particule EL, elle place ce radical dans une perspective de relation à Dieu. Pour comprendre la mission particulière de ce Séraphin, voyons  donc Plus précisément la signification symbolique de ces mots

À ce Propos,  notons tout d’abord que tous tes mots semblent se référer à une réalité similaire.

  • En effet,  la fonte, la fusion, le broyage ou l’écrasement évoquent tous l’éclatement de la forme solide. Plus précisément, la fusion désigne «le passage d’un corps solide à l’état liquide sous l’action de la chaleur. ».  Définition extraite du Petit Robert. Paris, 1976. 71- Ibid.
  • Le fait de broyer consiste, quant à lui, à « réduire en parcelles très petites, par pression ou par choc. ». Ibid.
  • Quant au fait d’écraser, il consiste à « aplatir et à déformer un corps par une forte compression, par un chue: ».Ibid.

Nous pouvons donc en déduire que l’enjeu du Séraphin KeHaTh (EL) consistera pour nous à placer nos œuvres (ce que nous concrétisons au cours de notre existence) au service de Dieu  (au service de l’amour), celles-ci étant  dès lors transmutées au contact de la puissance divine pour refléter

« comme en un miroir la gloire du Seigneur »

– 2 Corinthiens 1:4, 18.

À ce titre, le terme katat (KaPhTaVTaV) signifiant « broyer » est notamment employé dans le livre de l’Exode:

« Quant à toi, tu ordonneras aux Israélites de te procurer de l’huile d’olives broyées pour le luminaire, afin qu’une lampe brûle en permanence (dans la Tente du Rendez-vous] »

– Exode XXVII, 20.

Si nous interprétons ce verset sur un plan symbolique, nous  y voyons clairement une exhortation divine à extraire des fruits de notre existence (symbolisés par les olives) leur quintessence (l’huile) que l’on placera ensuite au service de l’amour (du luminaire) pour rendre témoignage à Dieu. Quant au terme de « fonte: », il évoque une opération alchimique (associée au Grand Œuvre) qui fait passer la matière brute au feu de la forge pour la transmuter et la conduire à son  accomplissement. En effet, l‘essentiel du Grand Œuvre consiste à dissoudre (solve) la matière déjà fixée pour en rassembler ensuite les éléments épars dans un arrangement nouveau (coagula), recommençant l’opération autant qu’il est nécessaire. Dans le cas qui nous intéresse, cette matière n’est évidemment autre que la nature humaine elle-même que nous sommes invités à travailler au feu de la forge (au feu de l’amour  qui habite notre cœur) pour la transmuter.

Nous touchons là une autre dimension de l’enjeu du Séraphin KeHaTh (EL): placer notre corps (en tant que concrétisation de l’esprit, de l’essence profonde) au service  de Dieu, étant ainsi progressivement transmuté (divinisé): c’est la résurrection de la chair. En ce sens, « nous savons bien que nous ne possédons pas totalement notre corps, il nous échappe en partie. Si j’ai une forte migraine, ne comptez pas sur moi pour vous faite une conférence intéressante. Si je suis à Paris, je ne suis pas à Lyon. Qu’une Mouche bourdonne, écrit Pascal, et voilà ce grand philosophe qui dévient incapable de penser. C’est par le corps que les époux communient dans l’amour, mais c’est le  corps qui empêche que leur union soit totale (telle est d’ailleurs la souffrance de l’amour). C’est dire que le corps n’est pas  parfaitement corps, il n’est que partiellement instrument d’action et de communication. Il sera véritablement corps  lorsqu’il ne  sera en aucune manière obstacle. Et quand je dis le corps, n’oubliez pas qu’il s’agit de l’univers tout entier qui n’est pas séparable du Corps.

« Le christianisme seul, rigoureusement seul, enseigne la divinisation. Non seulement l’enseigne, mais on peut dire qu’il est cet enseignement même. Tout le christianisme est là ! Comme le dit Guardini: « Le christianisme est le seul à oser situer un corps d’homme en plein cœur de- Dieu. » C’est quelque chose de prodigieux, n’est-ce pas ! Evidemment, ce n’est pas notre corps en tant qu’il est un  agrégat de cellules biologiques. Je me  moque éperdument de récupérer mes orteils ou mon pancréas pour l’éternité ! De même, lorsque nous mangeons le Corps du Christ ressuscité, nous ne mangeons pas des cellules biologiques. C’est d’ailleurs en ce sens que l’Évangile nous dit que

« les élus seront comme des anges dans le ciel »

– (Matthieu XXII,. 30),

C’est-à-dire que leur réalité corporelle sera toute nouvelle. Ne disons surtout pas que le corps deviendra esprit, ce serait le contresens le plus radical ! Nous resterons des hommes. Le corps ne devient pas esprit, il est plus corps que jamais, il devient pleinement corps. ».- Vanillon, François, foie de croire, joie de vivre, op. cit.

Ainsi, le corps est appelé (au contact de l’amour) à être transmuté (divinisé). Pour ce faire, il traversera un processus d’alchimie réordonnant en profondeur sa nature actuelle (comme l’évoquent les termes de broyage ou de fonte que nous avons extraits du radical), un processus rapporté par de nombreux témoignages aussi saisissants les uns que les autres. Pensons, à titre d’exemple, à l’hyperthermie (que, nous pourrions associer au processus de fonte) signalée chez de nombreux mystiques:

«la dominicaine Maria Villani, pour essayer d’obtenir un peu de fraîcheur, buvait jusqu’à quarante-cinq « livres » (libbre) d’eau glacée par jour, soit, en  fixant la livre à sa plus  faible évaluation (380 grammes), plus de quinze litres. C’est peut-être l’autopsie de cette mystique, faite neuf heures après sa mort survenue le 26 mars 1670, qui suggère le plus fortement l’action dans les tissus d’un type inconnu de réaction chimique ou autre. Quand les deux chirurgiens chargés de l’opération atteignirent le cœur, de la vapeur s’en éleva, et il était si chaud que les hommes de l’art se brûlèrent la main. Ils attendirent, dans l’espoir que l’organe se refroidirait, mais ils se brûlèrent encore plusieurs fois avant que la température eût baissé assez pour permettre l’ablation. ».

– Michel, Aimé, Le Mysticisme, L’homme intérieur et l’ineffable, Éditions Celt, Paris. 1973.