LE MYTHE GREC DE VENUS :

LA DEESSE APHRODITE

Dans la mythologie grecque, Vénus correspond à la déesse Aphrodite. Or les récits antiques nous précisent à son sujet que « sur les eaux primitives flottait le membre du Ciel (Ouranos) que son fils (Cronos) avait tranché d’un coup de serpe. De ces eaux fécondées par la virilité céleste, Aphrodite naquit. C’était près de l’île de Chypre. Levant vers la lumière son radieux visage, la déesse émergea des flots. Penchées sur le rivage, les Saisons lui tendaient les mains. Elles s’offrirent à la servir, la vêtirent d’une robe brodée et, pour parer leur maîtresse, se dépouillèrent de leurs plus précieux bijoux. Puis elles la conduisirent au palais des Immortels. Sous les pas d’Aphrodite croissait l’herbe verte. Elle avait mêlé des violettes à ses cheveux. Quand elle parut dans l’Olympe, quel dieu ne souhaita de lui offrir sa couche ? ».1

    D’un point de vue symbolique, cette naissance d’Aphrodite s’avère particulièrement pertinente à plusieurs égards. En effet, on nous rapporte d’abord qu’elle naquit de l’union du ciel (plus précisément du phallus de Cronos) et des eaux. Or, par son immensité et son inaccessibilité, le ciel fut toujours considéré comme un lieu où demeurent les dieux et à partir duquel ils peuvent transmettre leurs bénédictions à la terre. En ce sens, il fut associé aux puissances supérieures qui fécondent le monde d’en bas. Les eaux, quant à elles, ont toujours été considérées comme le symbole des émotions, des sentiments et des valeurs du cœur. Sur un plan purement biologique, cette assertion est d’ailleurs confirmée par le fait que des larmes sont générées par une activité émotionnelle intense. En effet, on rit aux larmes, on pleure de rage, de bonheur ou de tristesse.

    Née de l’union du ciel et des eaux, Aphrodite symbolise donc un amour pleinement incarné sur le plan des sentiments et des émotions. En effet, bien que l’amour personnifié par Aphrodite ait une origine surnaturelle (il est né du ciel), il est aussi profondément enraciné dans l’expérience terrestre puisqu’il naquit de l’écume de la mer. Il ne s’agit donc pas d’un amour élevé à une dimension purement spirituelle ou réduit à une simple attraction charnelle. En fait, Aphrodite concilie mystérieusement ces deux dimensions.

    D’autre part, la mythologie nous rapporte que de l’herbe verte croissait sous ses pas. Cette précision est particulièrement importante car elle signifie que l’amour transmute toute médiocrité pour élever l’être vers un état supérieur. En effet, l’herbe verte fait allusion au principe de régénération.

    Ainsi, l’amour embellit le monde et c’est d’ailleurs pourquoi celui qui aime est nécessairement beau aux yeux de celui qui sait s’y rendre sensible. Dès lors, Aphrodite fut également considérée comme l’incarnation même de la beauté. Précisons cependant qu’il ne s’agit pas ici d’une beauté exclusivement céleste, inaccessible ou éthérée. Au contraire, la beauté qu’elle incarne répond, une fois de plus, à des critères tout à fait terrestres et prend des allures parfaitement charnelles.

    Notons enfin que cette beauté est également une conséquence de l’harmonie que la déesse entretient avec les lois cosmiques. En effet, la mythologie nous rapporte que les Saisons vinrent à elle pour la parer de leurs plus beaux atours. Ainsi, elle incarne bien la beauté naturelle, un reflet des œuvres de l’esprit (représentées par le cycle des saisons). Il s’agit donc d’une beauté résultant de l’action harmonieuse de l’esprit sur la chair. C’est d’ailleurs pourquoi Aphrodite est à l’origine de toute forme d’harmonie, qu’elle soit céleste ou terrestre.

1 – Bonnard, André, Les Dieux de la Grèce, op. cit.