LE MYTHE GREC D’URANUS :

Chez les anciens Grecs, Uranus correspondait à Ouranos, le Ciel étoilé. Bien que la mythologie soit fort peu loquace à son propos, nous savons cependant qu’il forma le premier couple cosmique en s’unissant à Gaïa (à la Terre). De même, la tradition nous apprend que les Titans furent leurs enfants et les dieux leurs petits-enfants. Dans sa Théogonie, Hésiode nous précise en outre que la Terre enfanta d’abord

« un être égal à elle-même, capable de la couvrir tout entière, Ciel étoilé, qui devait offrir aux dieux bienheureux une assise sûre à jamais. ».

    Or cette affirmation met en exergue l’une des premières qualités incarnées par Ouranos : celle d’assurer une jonction étroite entre le plan divin (« les dieux bienheureux ») et le monde terrestre. En effet, il incarne essentiellement l’amour qui nous permet d’établir une union intime (une communion) entre notre dimension extérieure et notre dimension intérieure. Cet amour nous invite d’ailleurs à transposer notre centre d’intérêt en Dieu pour ainsi transcender les limites de notre ego.

    Cependant, Gaïa se lassa de l’amour d’Ouranos à qui elle reprochait d’avoir jeté dans l’Erèbe ses premiers enfants : les Cyclopes et les Géants aux cent bras. En fait, Ouranos haïssait les enfants que Gaïa lui avait donnés. Or cette attitude est fort révélatrice sur un plan symbolique car elle évoque clairement chez Ouranos un refus de participer au monde de la matière, si cela doit impliquer que son état de conscience, parfaitement harmonisé aux réalités spirituelles, soit ainsi limité (ce que les fils d’Ouranos, les Cyclopes et les Géants aux cent bras évoquent éloquemment). Ce rejet d’une conscience limitée par les modalités de l’incarnation (en raison de son rapport à Gaïa) est donc une caractéristique de l’influence uranienne par laquelle nous échappons justement à l’emprise de ce monde pour nous réconcilier pleinement avec les réalités spirituelles.

    Gaïa, poursuit le mythe, demanda alors à son fils Cronos, l’un des Titans, de la venger. Elle lui procura donc une serpe et le dissimula près du lieu où Ouranos devait la rejoindre. Aussi, lorsqu’il retrouva son épouse, Cronos surgit soudainement et l’émascula. L’organe divin, précise le récit, tomba alors dans la mer et, de sa semence répandue sur l’eau, naquit la déesse Aphrodite.

    Sur un plan symbolique, nous avons vu précédemment que Cronos incarne le pouvoir de concrétisation permettant à une réalité encore abstraite et subtile de passer des mondes infinis au monde de la finitude et du créé, au monde de l’espace et du temps (il était d’ailleurs confondu avec Chronos, le Temps). Ainsi, Ouranos émasculé par Cronos représente l’amour divin qui, passant des plans célestes au monde de la matière (au monde de la limitation), voit sa puissance et sa force s’amoindrir notablement. Si notablement même qu’il ne peut plus régner en ce monde où il apparaît désormais d’une grande vulnérabilité (il sera destitué de son trône par Cronos). Toutefois, s’incarnant en nous au niveau de notre dimension émotionnelle (les eaux de la mer), il y génère alors l’amour humain (représenté par Aphrodite).

    Il est intéressant ici de rappeler qu’Uranus est l’octave supérieure de Vénus. En d’autres termes, il est, comme nous l’avons précisé, une sublimation de l’amour vénusien (de l’amour humain) nous conférant une dimension profondément mystique. Cette relation étroite entre Vénus et Uranus est donc admirablement illustrée par le lien unissant le dieu Ouranos et la déesse Aphrodite.