LE MYTHE GREC DE LA LUNE

LES DEESSES ARTEMIS, SELENE ET HECATE

 Dans les mythologies grecque et romaine, la Lune revêt trois visages fort différents incarnés par trois divinités distinctes. En effet, lorsqu’elle est croissante ou décroissante, elle est associée à Artémis (ou Diane), la sœur jumelle d’Apollon, fille de Zeus et de Léto. Lorsqu’elle est pleine, elle est mise en rapport avec Séléné. Enfin, la nouvelle Lune est représentée par Hécate. En fait, sachant que ce luminaire est associé à l’âme, nous pouvons déjà en déduire qu’Artémis représente l’âme qui, se tournant vers le Soleil (l’esprit), s’affranchit du joug des pulsions égoïques et instinctuelles qui la maintenait prisonnière dans le monde d’en bas (symbolisme de la Lune croissante) ou encore l’âme qui, se tournant vers le plan matériel, y incarne la lumière de l’esprit (symbolisme de la Lune décroissante). Séléné représente, quant à elle, l’âme libérée du cercle clos du monde, désormais en communion plénière avec les réalités de l’esprit (ce qu’évoque la pleine Lune). Enfin, Hécate symbolise l’âme qui, descendue dans le monde d’en bas, se retrouve sous la tutelle des puissances ténébreuses (la nouvelle Lune est obscure).

A ce titre, la mythologie est d’ailleurs fort éclairante sur les différentes dimensions attribuées aux trois déesses. En effet, les anciens Grecs nous rapportent qu’Artémis était la déesse de la chasse. Armée de son arc et de ses flèches d’or elle poursuivait donc les bêtes sauvages, les traquant dans les forêts aux ombrages épais. Sur un plan symbolique, cette image d’Artémis nous suggère bien l’action coagulante de la Lune qui reflète et incarne dans le monde (symbolisé par la forêt épaisse) les impulsions de l’esprit (suggérées par les flèches d’or dont est pourvue Artémis), contribuant ainsi à une libération du joug des pulsions instinctuelles (représentées par les bêtes sauvages).

   

  Quant à Séléné, à la fois sœur et épouse d’Hélios (le Soleil), c’est certainement son amour pour le berger Endymion qui la rendit célèbre. Or la mythologie nous rapporte, à propos de ce jeune berger, qu’ayant demandé à Zeus l’immortalité, le souverain des dieux y consentit à condition qu’il soit plongé dans un sommeil éternel. Une nuit, Séléné le surprit donc endormi dans une caverne du mont Latmos. Eprise de ses charmes, elle revint par la suite chaque nuit partager sa couche. Endymion représente l’homme dont l’âme est en communion plénière avec les sphères divines, cessant ainsi de focaliser sa conscience sur les réalités du monde extérieur pour l’orienter désormais vers les réalités de l’esprit (symbolisme du sommeil). Ainsi plongé dans une profonde contemplation, il permet alors à son âme (évoquée par Séléné) d’incarner les forces de l’esprit qui seraient autrement demeurées désincarnées et stériles.

    Enfin, la Lune correspond à Hécate qui était associée au monde des ombres. En effet, elle régnait, en tant qu’assistante de Perséphone (la reine des Enfers), sur l’âme des morts. Cette déesse gouvernait donc les âme de ceux qui étaient morts aux plans de l’esprit (la source de toute vie) et qui erraient, désormais, dans le monde d’en bas, une contrée plongée dans les ténèbres. En ce sens, elle « protégeait les pas des hommes dans les sentiers escarpés, dans les défilés des montagnes, dans les carrefours indécis et trompeurs, et qui parfois les épouvantait par sa lumière propice aux apparitions des spectres et aux enchantements des magiciennes maléfiques ».1 En d’autres termes, sa fonction principale était de préserver l’homme de l’illusion et de l’égarement, le mettant en garde contre les multiples pièges présents en ce monde.

  1 – Meunier, Mario, La Légende Dorée des dieux et des héros, Albin Michel, Paris, 1980.