L’ANALYSE KABBALISTIQUE DE HaHaH (EL)
Le nom du Malakim HaHaH (EL) est constitué d’un radical formé de la lettre He répétée trois fois. Ces trois lettres ne forment entre elles aucun mot hébreu significatif. Pour cerner son enjeu, nous devons donc focaliser notre approche sur l’analyse symbolique de la lettre He, seule lettre présente au sein du radical à l’origine de son nom. À ce propos, nous avons déjà précisé qu’elle est issue d’un ancien idéogramme représentant une fenêtre, c’est-à-dire :
« Une ouverture faite dans un mur, une paroi, pour laisser pénétrer la lumière et l’air. ».
– Définition extraite du Petit Robert.
Nous avons déjà affirmé que la lumière et l’air incarnent, sur un plan symbolique, deux aspects privilégiés de l’expression divine au sein du créé.
En effet, la lumière incarne la puissance divine en tant que force illuminative dissipant, au sein de la conscience, toute forme de ténèbres qui pouvait l’obscurcir jusqu’alors. Ainsi,
« Quand Dieu protège les hommes et les bénit, il fait lever sur eux la lumière de sa face ; et à cette lumière ils avancent. Elle les éclaire et les guide. La Sagesse est un reflet de cette lumière éternelle qui assure la connaissance de Dieu et de sa Parole : la Loi elle-même est lumière. Combien plus pleinement encore le Messie que préfigure “le Serviteur de Il IVH”, annoncé comme “la lumière des nations” : “la grande lumière” de la Loi nouvelle qui doit briller sur les habitants du pays ténébreux. […] Ainsi, Jésus se présente en ces termes : “Je suis la Lumière du monde ; qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais aura la lumière de la vie.” À ceux qui fuient cette lumière, parce qu’elle dénonce leurs œuvres mauvaises va un avertissement sévère : ils sont déjà jugés, c’est-à-dire condamnés. À ceux qui refusent de la voir, s’adresse la leçon qu’illustre la guérison de l’aveugle-né rapportée par Jean : ils comptent parmi les incrédules dont le “dieu de ce monde [Satan] aveugle l’entendement pour qu’ils ne voient pas resplendir la lumière de l’Évangile de la gloire du Christ, qui est l’image de Dieu.” Les autres, ceux qui “œuvrent en Dieu”, vont vers la lumière ou marchent dans la lumière… […] Les chrétiens, “appelés des ténèbres à la merveilleuse lumière” de leur Maître “pour que les illumine la connaissance de la gloire de Dieu, qui est sur la face du Christ”, et désormais enfants de lumière, deviennent ainsi eux-mêmes “lumière dans le Seigneur”; revêtus “des armes de lumière”, ils “brillent comme des foyers de lumière dans ce monde”… »,
– Gérard, André-Marie, Dictionnaire de la Bible, op. cit.
Quant à l’air, il incarne la puissance divine en tant que force vivificatrice. Ainsi, lorsque Dieu modela l’homme,
« Il insuffla dans ses narines une haleine de vie et l’homme devint un être vivant. ».
– Genèse II, 7.
Dans la même perspective, le psalmiste déclare :
« Tu [Dieu] caches ta face, ils [les hommes] sont tremblants. Tu leur retires le souffle, ils expirent et retournent à la poussière. Tu envoies ton souffle, ils sont créés, et tu renouvelles la face de la terre. ».
– Psaume 104 (103), 29-30.
En outre, si le souffle confère la vie sur un plan organique, il la confère également sur un plan spirituel et nous conduit alors vers une véritable expérience de transcendance.
Ainsi, « qu’il s’agisse d’Othoniel (Juges III, 10), de Jephté (Juges XI, 29) ou de Gédéon (Juges VI, 34), des hommes deviennent des héros par le souffle de Dieu. L’exemple le plus typique est celui de Samson (Juges XIII, 25 et XIV, 6) qui, ayant reçu le souffle de Dieu, déchire un lion et armé d’une mâchoire d’âne tue mille Philistins (Juges XV, 14). ».
– Chevalier, Jean, Gheerbrant, Alain, Dictionnaire des Symboles, Robert Laffont, Paris, 1982.
Enfin, c’est également en soufflant sur les apôtres que le Christ leur transmit l’Esprit Saint :
« Ayant dit cela, il souffla sur eux et leur dit: “Recevez l’Esprit Saint.” ».
– Jean XX, 22.
En ce sens, la fenêtre, et conséquemment la lettre He, évoque un processus par lequel la puissance divine, en tant que force illuminative (évoquée par la lumière) et vivificatrice (évoquée par l’air), nous investit, éclairant notre entendement sur les réalités divines et nous insufflant une force nouvelle vivifiant notre esprit. C’est sans doute d’ailleurs en ce sens que Sicard de Crémone écrivait à son époque :
« Les fenêtres qui protègent des tempêtes [pluie, froid, vent] et font entrer la lumière sont les docteurs qui résistent aux troubles des hérésies et répandent la lumière sur les fidèles de l’Église. ».
– Sicard de Crémone, Mitrale seu de officiis ecclesiasticis summa, Pères Latins, 213.
Toujours dans la même perspective, nous avons aussi précisé dans une étude antérieure que la lettre He s’écrit He – ALePh. Or nous savons qu’ ALePh évoque la puissance divine en tant que force créatrice (fécondante et vivifiante). L’idéogramme qui lui est associé représente d’ailleurs une tête de taureau ou de bœuf, un animal qui était considéré, dans la tradition hébraïque, comme étant le père du troupeau en tant que chef et géniteur, symbolisant traditionnellement la puissance créatrice. En ce sens, le nom même de la lettre He évoque un processus de transmission de la puissance divine (suggérée par la lettre ALePh ). Ajoutons qu’au niveau du radical formant le nom HaHaH (EL), cette lettre He est répétée trois fois. Ceci pourrait évidemment être mis en rapport avec la constitution ternaire de l’homme qui, nous le savons, est composé d’un esprit, d’un corps et d’une âme. Dans cette perspective, le nom HaHaH (EL) évoque un processus par lequel la puissance divine nous investit au niveau des trois plans constituant notre être. Or ceci n’est pas sans faire écho à ces paroles de saint Paul adressées aux Thessaloniciens :
« Que le Dieu de la paix lui-même vous sanctifie totalement, et que votre être entier, l’esprit, l’âme et le corps, soit gardé sans reproche à l’Avènement de notre Seigneur Jésus-Christ. ».
– 1 Thessaloniciens V, 23.
Considérant ce qui précède, nous pouvons en déduire que l’Ange Malakim HaHaH (EL) nous conduira à nous ouvrir pleinement à la puissance de Dieu en nous plaçant en communion avec elle par un processus d’intériorisation et de centrage, rassemblant autour de son axe central toutes les facultés qui le composent (ce processus d’intériorisation et d’unification permettant en effet un contact direct avec l’énergie spirituelle). Dès lors, nous n’exprimerons plus les réalités égoïques de notre moi factice, mais celles de notre essence profonde : tant au niveau de l’esprit (par notre volonté), de l’âme (par nos pensées et nos émotions) que du corps (par notre action). Sur un plan supérieur, l’Ange Malakim HaHaH (EL) nous invitera également à rayonner la puissance divine, en tant que force illuminative (évoquée par la lumière) et vivificatrice (évoquée par l’air), celle-ci nous ayant investis sur les trois plans de son être.