ANALYSE KABBALISTIQUE DE :

Le nom du Séraphin SeYaT (EL) est constitué d’un radical composé des lettres Samech, Yod et Teith à partir desquelles nous pouvons former (en redoublant la lettre Teith) le mot  Tît  (TeithYodTeith), un terme désignant « la boue », « la vase » ou  «:le limon »

 « Je les écrase comme la poussière de la’ terre; comme la fange [tît] des nies je les broie et pulvérise. »

– 2 Samuel MU, 43

Quant à la particule EL  elle place ce radical dans une perspective de relation, à Dieu. Pour comprendre la mission particulière de ce Séraphin, voyons donc plus précisément la signification symbolique de ce mot.

D’un point de vue symbolique, « la boue» (« terre,  poussière détrempée dans les rues, les chemins) , « la vase » (« dépôt de serre et de particules organiques en décomposition, qui se ferme au fond des eaux stagnantes ou à cours lent) ou « le limon » (Terre ou  fines particules, entraînées par les eaux et déposées sur le lit et les rives des fleuves) évoque l’image d’une Matière à l’état brut,  informel. Toutefois, cette matière n’est pas pour autant stérile, bien au contraire. En  effet, elle est saturée d’eau, un élément essentiel à toute forme de vie et que les anciens ont toujours très étroitement associé à la grâce divine qui féconde le créé. La tradition hébraïque n’y échappe d’ailleurs pas. Ainsi,  « la Palestine est une terre de torrents et de sources, Jérusalem est arrosée par les eaux paisibles de Siloé. Les fleuves sont des agents de fertilisation d’origine divine, les pluies et la rosée apportent leur fécondité et manifestent la bienveillance de Dieu. Sans l’eau, le nomade serait immédiatement condamné à mort et brûlé par le’ soleil palestinien; ainsi l’eau qu’il rencontre sur sa route est comparable à la manne : en le désaltérant,  elle le nourrit. C’est pourquoi l’eau est demandée par la prière, elle est  objet de supplication. Que Dieu entende le cri de son serviteur, il envoie  les ondées et fait rencontrer les puits et les sources. L’hospitalité  exige qu’une eau fraîche soit présentée au visiteur, que ses pieds soient lavés, afin d’assurer la paix de son repos. Tout l’Ancien Testament célèbre la magnificence de l’eau. Le Nouveau Testament recevra cet héritage et saura l’utiliser. Le Seigneur est Comparé à une pluie de printemps. (Osée VI, 3), à la rosée qui donne aux fleurs leur croissance (Osée XIV, 6), aux eaux fraîches qui s’écoulent des montagnes, au torrent qui  abreuve.

Dès lors,  en tant que terre saturée d’eau, la boue évoque la matière qui, pénétrée par la grâce divine, est remplie de ressources et de richesses. Plus précisément encore, nous savons que le mot hébreu Tît,  » la boue », s’écrit TeithYodTeith. Or la lettre Yod incarne la puissance divine pleinement opérative au sein de la création. En effet, cette  lettre évoque Dieu en tant qu’artisan qui façonne, sculpte, modèle et cisèle Sa création de Ses mains (dont l’idéogramme évoque précisément la  lettre Yod). Ainsi, la boue symbolise la matière qui, pénétrée et façonnée par la grâce divine, révèle toutes les richesses qu’elle recèle dans ses profondeurs. À ce titre d’ailleurs, l’eau rend la terre humide et conséquemment malléable, c’est-à-dire Pleinement apte à être travaillée.

Dans la même perspective, un passage de la parabole dés lettres citée dans le ZOHAR nous apprend que le Saint, béni-soit-il, refusa d’accorder à la lettre  Teith l’honneur de commencer la création en lui répondant:

« Tu ne serviras pas à la création du monde; d’abord parce que le bien que tu  représentes est enfermé et caché en toi; ainsi qu’il est écrit : O combien est grande l’abondance de votre bonté, que vous avez cachée pour ceux qui vous craignent; donc le bien est réservé pour le monde futur…»

Zohar , I,3a

Cette lettre à laquelle est associée l’image de la boue évoque donc clairement la matière riche de potentialités (ce bien qui est enfermé et caché dans ses entrailles) et qui, par l’opération de là puissance divine (du Yod), sera promesse d’une création nouvelle.

Toutefois, au niveau du radical constituant le nom du Séraphin SeYaT (EL), la lettré Samech est apposée aux lettres Teith et Yod. Or, au même titre: que la lettre Vav, le Samech incarne un principe d’union étroite entre deux éléments, cette union permettant l’incarnation et le déploiement de la puissance divine au sein de la Création. De Manière plus précise, Samech est issu d’un ancien idéogramme  représentant  un poteau ou un pilier et c’est là un élément fort intéressait puisque le pilier ou le poteau (parfois évoqué par un simple tronc d’arbre ébranché et planté à même le sol) représente, pour de nombreuses traditions antiques, l‘axe du monde (l’axis Mundi) qui unit le ciel (les sphères divines) et la terre (le plan matériel), assurant ainsi l’épanouissement de toute forme de vie.

En Égypte pharaonique, par exemple, il était représenté par le pilier Djed qui se dressait vers le ciel. Identifié au Nil, il était considéré par les anciens comme un canal privilégié par lequel se répandait dans le monde la force spirituelle nécessaire à sa survie.

À ce titre d’ailleurs, si la lettre Samech évoque un processus de médiation, elle évoque également un maintien comme le suggère d’ailleurs le nom même de cette lettre, Samech (SamechMemKaph), signifiant « soutien » ou « appui ».

« Oui certes, Dieu vient à môn aide, le Seigneur est le soutien (Samech] de ma vie. »

(Psaume 54 (53), 6).

Ainsi, le pilier a souvent été mis en correspondance étroite avec l’arbre de vie que saint Chrysostome qualifie, dans sa sixième homélie sur Pâques,  de :

« ferme soutien de l’univers, lien de toutes choses, support de toute la terre habitée, entrelacement cosmique… Fixé par les clous invisibles de l’Esprit, pour ne .pas vaciller dans son ajustement.au divin; touchant le ciel du sommet de sa tête, affermissant la terre de ses pieds, et, dans l’espace intermédiaire, embrassant l’atmosphère entière de ses Mains incommensurables. ».

Dès lors, nous pouvons en déduire que le radical (SamechYodTeith) évoque un processus par lequel nous  plaçant en communion étroite et intime avec le Créateur, devenons un canal par lequel la  puissance divine investit la matière, la pétrissant et la’ transformant pour la conduire à sa plénitude (assurant ainsi la présence divine au sein du créé). En ce sens, SeYaT (EL) nous invite à nous  placer, en communion intime avec Dieu, Lui offrant les ressources et les richesses dont nous  disposons, celles-ci étant dès lors transmutées pour assurer le maintien de la présence divine au sein du créé.

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